Catégorie : Notes de lecture

quel coussin pour amortir sa lecture en mode chill quand on veut se mettre bien avec un livre ?

quel coussin pour amortir sa lecture en mode chill quand on veut se mettre bien avec un livre ?

La gamme des coussins viande rôti c’est la meilleure gamme pour lire un bon livre c’est une gamme ultra moelleuse ultra tendre comme des tenders on se met carrément bien avec un petit porcelet rôti 100% coton dans le dos pour lire “Milieu” d’Adrien Lafille paru aux éditons Vanloo (https://www.editionsvanloo.fr/) on case tranquillement le groin et la queue en tire-bouchon entre la troisième lombaire et la cinquième cervicale et puis on ouvre le bouquin en plein délassement une page au pif et là effet woaw garanti

“Elles avaient fabriqué les étoiles pour rien puisque le silence arrête les corps qui n’ont pas le silence. Donc Violette a pris la hache et puis elle a cogné très fort dans l’étoile externe pour faire une ouverture, fatigue très grande après ça mais c’était pour avoir moins de fatigue par la suite. Lucie a fait pareil sur l’étoile interne qui était entre l’étoile externe et la maison. Quelques coups de hache ont suffi c’était pas solide c’était vraiment faillible.” (p.70)

à chaque lecture sa gamme perso et adaptée je recommande vivement pour l’avoir testé l’oreiller aile de poulet pour la lecture pépouze de “Basalte et Javel” d’Antonin Veyrac paru aux éditions Supernova (https://www.supernovaeditions.com/category/poesie_contes/) c’est un confort absolument totalement adéquat comme seul peut en offrir un oreiller aile de poulet pour lire ceci

“Se doucher, se laver les dents, écouter le café se faire, allumer sa première clope.
Y’a-t-il un concept pour comprendre tout cela ?”
(p.35)

Enfin nous vous conseillons aimables lecteurs insatiables du haut de notre expertise savante le coussin maïs grillé à se mettre sous la nuque pour se retourner le crâne bien comme il faut en lisant  “MALP” le bouquin de Margaux Frasca paru aux éditions Cormor en Nuptial (https://www.mollat.com/livres/2427602/margaux-frasca-malp#), avec ce coussin on sent que ça craque et que c’est pour le bien de l’os :

“Je cherche toujours le truc que j’ai perdu.
La petite chose a l’air dans mon esprit.
Dans le jardin du centre, les arroseurs automatiques font leur ronde.
Le jet d’eau est interféré par un pot de lavande et renvoyé dans son sens contraire en postillons de vapeur. Il ne déviera pourtant pas de ce pour quoi il est programmé.
ça c’est du spectacle.”
(p.23)

Allez, bisous, et n’oubliez pas de ouater le monde.

Pointe Sèche

Pointe Sèche

de Johan Grzelczyk

 

ériger les arbres
réfléchir le ciel doucement

 

une pointe sèche ça gratte
ça grogne sur le métal grommelle
creuse ferraille
c’est pas qu’une simple imprégnation faut que ça écharde c’est pas comme avec un feutre
tu le poses sur ta feuille blanche et tu coules dessus tu écoules dessus une impression tu lèches le papier tu baves dessus mais
la pointe sèche
c’est différent
en gravure
ça veine un sillon ça nerve
ça fait des fleuves vides
ça prodigue
du limon

 

apaiser la terre
la rapiécer d’espaces libres
s’y tenir
tenir droit
se maintenir

 

mettre tous les verbes des poèmes
à l’infinitif
un infinitif
ne s’épanche pas
et c’est simple à comprendre c’est lié au fait 100% scientifique (j’ai fait des études) qu’un
infinitif c’est non-émotionnel
exemple
“apaiser la terre” vs “apaisons la terre”
le premier n’implique pas que t’y mettes du tien
pas de louche d’affects
pas de sujet transvasé transplanté
y’a pas de personne y’a pas de temps
y’a pas de moi
(on va dire ça comme ça)
et c’est un peu la pointe sèche
pas un épanchement émotionnel d’aquarelle
plutôt
de l’épluchage
(bien sûr il y a de l’émotion dans la gravure)
(et alors ? on a bien le droit de simplifier pour les besoins du raisonnement ?)
(non mais)

 

tomber la ville
creuser ses vides
l’emplir d’errances

 

alors c’est sec
alors c’est doux
alors c’est coriace
alors c’est en l’air
alors c’est caillouteux
alors c’est sinueux
alors c’est cérébral
alors c’est généreux
alors c’est limpide
il est question de produire du “déchet” autour des infinitifs
(de l’alluvion)
oui parce que le creux fait ses bourrelets
et donc les mots fleurissent comme
des patates on va dire


toucher au but incertain
construire les ruines

infester
gravir
pousser la lutte jusqu’à autrui

recouvrir
le débattre
ne plus quêter sa survie

 

les poèmes se finissent
comme une pierre qui tombe de la poche
ils s’en vont rejoindre un chemin
qu’on vient
de battre en brèche
ce qu’il y a partout chez Johan Grzelczyk
des petites brèches
ouvertes
qui craquent comme des allumettes

 

(Johan Grzelczyk, « Pointe sèche », éditions Pariah, 2020, https://pariahpropagande.bigcartel.com/products)

PS : je mets 10/10 pour la couverture du livre, noire comme du pain brûlé, mais plus nourrissante.